Soutien à l’Ukraine

Tu es dans ton masque

Anonymous petitL’étymologie du mot masque nous livre plusieurs sens liés à ses fonction plutôt qu’à sa racine. C’est ainsi que nous trouvons des origines Italienne et Espagnole : le mot italien maschera viendrait de mascara soit, en espagnol « visage de plus » (mas et cara). Mais il existe également des pistes latines et arabes qui renvoient aux notions de spectre, sorcière, faux visage ou de tache noire, salissure…. Le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales passe de « faux visage » à « pièce d’étoffe servant à dissimuler une partie du visage » ; Calvin lui donne le sens de « fausse apparence ». Mais il existe aussi le sens de « reproduction du visage obtenue par moulage » ou « aspect particulier que prend le visage de la femme en fin de grossesse ». Enfin, le masque est aussi un appareil couvrant le visage pour le protéger.

Cacher, dissimuler mais aussi révéler un visage ou certaines caractéristiques de ce dernier, le masque a pour fonction aussi de protéger d’une agression et son sens étymologique le relie à des caractères sombres et négatifs (sorcières, tache, salissure…).

Son sens commun actuel présente aussi une double face : cacher/révéler, qu’il mène le carnaval, participe aux grandes fêtes rituelles, s’expose dans l’art ou le théâtre… Les masques derrière lesquels nous tentons de nous cacher ou ceux que nous attribuons aux autres sont des expressions de ce que nous pensons être la réalité. Ils s’inscrivent dans notre interprétation des situations et construisent notre compréhension du monde.

Que pouvons-nous retirer de ce détour par l’étymologie ?

Il nous montre que le masque n’a pas besoin d’un support physique pour exister. Que nous le voulions ou non, ces masques que nous adoptons, nous cachent et nous protègent autant qu’ils nous révèlent. Finies donc les illusions qui voudraient que nous maîtrisions l’apparence que nous donnons aux autres, à travers les gestes, les postures et les paroles que nous adoptons.

Ils sont en partie le résultat de ce que nous voulons donner à voir aux yeux des autres au travail, à la maison, en soirée avec des amis ou des connaissances, à l’Église même et dans les différents rôles que nous endossons en lien avec les obligations de notre existence.

Nous pouvons donc associer la notion de masque à celle de rôle que nous adoptons dans la société dans laquelle nous évoluons. Nous comprenons dès lors que l’idée de jeter à bas notre masque pour révéler notre personnalité réelle se révèle illusoire selon notre propos.

Est-ce à dire que l’authenticité est un leurre et que nous sommes condamnés à ne jouer que des faux semblants ?

S’il me paraît clair que, quoi que nous fassions, nous sommes destinés à être nous-même, la Bible nous invite clairement à la cohérence avec l’appel qui nous a été adressé par notre Dieu en Jésus-Christ « en toute humilité et douceur, avec patience, nous supportant les uns les autres dans l’amour» (Ephésiens 4.1-2). C’est je pense le sens des interpellations que Jésus lance aux chefs religieux de son temps : « Vivez en cohérence avec le modèle dont vous vous réclamez et mettez en pratique l’esprit de la loi (c’est à dire l’amour) et non seulement la lettre que vous avez inventée ».

En Christ, nous n’avons plus de craintes à avoir, car il nous a délivré ; nous n’avons plus besoin de nous cacher car nous sommes aimés et acceptés tels que nous sommes ; nous n’avons plus besoin de nous déguiser car nous sommes rendus justes aux yeux de Dieu.

Notre vocation finalement ne serait-elle pas de nous réinventer un masque ? Celui qui nous ferait refléter la beauté de Christ pour nos contemporains.

G BEZIN