Soutien à l’Ukraine

Être témoin face à la culture – Actes 17. 16-34

Le discours de Paul à Athènes est un paradoxe. Lors de son deuxième voyage, Paul part de Macédoine, et se retrouve seul à Athènes, qui, bien que ne rayonnant plus autant qu’à l’époque classique, est encore un centre culturel et philosophique reconnu, où beaucoup viennent recevoir un enseignement de sagesse. Paul va au-devant des hommes de la ville pour leur parler : à la Synagogue, où il rencontre des Juifs, sur l’agora, où se tiennent les philosophes, principalement Épicuriens et Stoïciens, et tous ceux qui attendent avec impatience les dernières nouvelles du monde.

Dans ce contexte,Festival 1 Paul passe pour un personnage insignifiant : un « discoureur » qui palabre sur des bribes de connaissances ? Ou sur une religion étrangère? Ou pire, un homme suspect ? Ses auditeurs le pressent de se rendre auprès de l’Aréopage pour juger de ses intentions. Il parle, et finalement, rien ne change : ceux qui le prenaient pour un ignare au départ se moquent de lui à la fin, les autres lui disent qu’ils y penseront plus tard… très peu sont convaincus, et d’ailleurs, on n’a pas entendu parler d’une Église fondée à cette époque à Athènes… Alors pourquoi ce discours est-il important ?

Même s’il est peu suivi d’effet, il est une perle d’évangélisation moderne, une source d’enseignement. Tout d’abord, Paul fait le tour de la ville, étrangère à la culture juive. Pour comprendre qui ils sont, pour adapter son discours à ce que son auditoire peut se représenter. Ce qu’il va voir ne va pas lui plaire ! Des idoles, des temples païens partout ! Cependant il ne se laisse pas aller à la colère, et va jusqu’à commencer son discours par un compliment : il vante la religiosité de la ville ; même si on peut penser que cette remarque est ironique, elle ne peut être prise que pour un compliment puisque les plus grands, comme l’historien Josèphe lui ont donné cette réputation…

Paul continue à créer des « ponts » avec ses interlocuteurs. Aux Juifs, il cite l’Ancien Testament, il nomme Jésus ; aux Grecs, il parle de leur religion : le « dieu inconnu » de leurs autels n’est-il pas le seul Dieu à connaître ? Il argumente avec des citations de leur propre culture ; les Stoïciens comprendront un monde organisé dans le temps et dans l’espace par exemple. Mais Paul leur raconte une autre histoire : celle du Dieu Unique Créateur du monde, de tous les hommes, qui pourvoit à leurs besoins. Des hommes qu’Il jugera et qui ont besoin de Lui autant pour survivre physiquement que pour que leur rédemption. Dieu règne sur l’espace et le temps, Il n’habite pas les autels taillés par la main humaine, ce que cette fois les Épicuriens pourront accepter, puis-qu’eux-mêmes jugent le culte aux dieux superflu.

La conséquence de l’unicité du Dieu Créateur et de la dépendance des hommes, c’est la nécessité pour eux de changer de vie pour attendre la venue de Celui que Paul ne nommera pas, mais qui sera juge de tout homme, car Il a été choisi et ressuscité par Dieu. Mais un esprit qui croit savoir n’est pas prêt à croire, ni à se repentir, et ils ne comprendront rien, assimilant Jésus et « anastasis » (la Résurrection) à deux idoles étrangères. Pourtant, ils étaient attentifs jusque-là, sensibles à la logique et à la qualité de son discours, car avec les nouvelles fraîches, la rhétorique est l’une de leur passion. Mais le sujet de la Résurrection coupera net leur intérêt : l’esprit philosophique des Grecs va à l’encontre de la résurrection, surtout de la chair, considérée comme une entrave, voire une prison pour l’âme. On voit ici que la croyance en la Résurrection est la pierre d’achoppement de la Foi chrétienne.

Ce discours, finalement, nous conseille de garder la maîtrise de soi, d’aller vers les étrangers, de les connaitre pour adapter notre discours à leur compréhension.

Il nous rappelle aussi que l’homme, même de bonne volonté, n’a pas la décision de la conversion : comme le dit Paul ici, c’est Dieu qui décide pour l’homme et non l’inverse!

Sylvie Kibleur