Notre foi en un Dieu créateur influence notre regard sur le monde, sur les êtres humains et sur la nature ; elle influence aussi notre façon de vivre dans ce monde. Mais nous ne discernons pas toujours le lien entre notre foi, notre vision spécifique du monde et la protection de l’environnement.
Multiplier et remplir
Au début du XIXe siècle, la population mondiale s’élevait à environ un milliard d’habitants ; nous sommes aujourd’hui plus de sept milliards… Il a fallu nourrir et loger cette population croissante, et donc développer l’agriculture et l’industrie, puis les réseaux de transports et de communication, afin d’assurer la production et la distribution des biens à grande échelle. L’enjeu était de trouver des sources d’énergie pour permettre ce développement rapide. Or, ces mesures indispensables ont perturbé les équilibres naturels et engendré une pollution massive.
On a recensé environ 1 million d’espèces animales et 260 000 espèces végétales, mais les milieux naturels les plus riches (forêts, marais, etc.) sont menacés ainsi que 10 000 à 15 000 espèces. Dans les pays en développement, la déforestation, la culture sur brûlis, l’élevage mal conduit et les déchets non collectés et non recyclés représentent une menace redoutable pour l’environnement, en particulier pour l’agriculture, principale activité de la majeure partie de la population. Les pays développés sont également aux prises avec de nombreux problèmes engendrés par l’utilisation abusive de polluants divers, notamment chimiques, issus de l’industrie et générés par un mode de vie peu adapté au respect élémentaire de l’environnement.
La population mondiale pourrait culminer à 9 milliards d’habitants d’ici un siècle. Le défi est donc de trouver des solutions agricoles, industrielles, urbaines et énergétiques, qui nuisent le moins possible à l’environnement, tout en permettant de nourrir au mieux le plus grand nombre d’habitants, sans freiner le progrès scientifique, technologique, économique. C’est une définition du « développement », auquel on ajoute désormais l’adjectif « durable » : le développement actuel ne doit pas remettre en cause le développement futur…
Dominer et soumettre
Au commencement, l’homme et la femme étaient invités à « dominer et soumettre » les animaux et les végétaux en communion avec Dieu, comme des êtres créés « à son image », capables de penser et d’agir avec amour, justice et sagesse. Ce « mandat » demeure après la « chute » (prétention de l’être humain à l’autonomie et rupture de la communion avec Dieu), mais il est désormais plus difficile à mettre en œuvre…
L’Ancien Testament précise qu’il ne s’agit pas de « dominer » sur les êtres humains de façon arbitraire et tyrannique, mais de respecter les limites fixées par Dieu : droit de rachat des « serviteurs », libération lors de l’année sabbatique, domination bienveillante du roi et des responsables religieux comme des « bergers qui prennent soin de leur troupeau » (Lévitique 25 et 26 ; Ezéchiel 34.4). Ces qualités s’appliquent également à la domination de l’être humain sur la nature qu’il est appelé à gouverner avec sagesse (Psaume 8). Le sabbat, par exemple, est une limite posée par Dieu à l’activité humaine et un rappel à honorer le Créateur. La terre doit également « jouir de ses sabbats », se reposer pour être plus féconde ; mais si ce repos n’est pas respecté, elle « vomit » ses habitants (Lévitique 18.27).
« Cultiver » et « Garder»
En hébreu, ces deux verbes ont un sens littéral et pratique, mais aussi un sens religieux et spirituel : on rend un culte à Dieu (on « cultive » la relation avec Dieu), on garde les commandements et l’alliance de Dieu, ou son âme.
Ces verbes nous rappellent que notre vocation de remplir et cultiver la terre implique notre responsabilité sur les plans matériel et spirituel : prendre soin de la création, dans le temps présent, c’est aussi une façon d’aimer Dieu et notre prochain…
Frédéric Baudin, pasteur à l’EEL d’Aix-en-Provence